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Le soleil se levait tout juste sur le fleuve Niger, mardi 17 septembre, vers 5 h 30, lorsque des tirs et des détonations ont retenti à Bamako, autour de l’école de gendarmerie, dans le quartier de Faladié, et aux environs de l’aéroport Modibo-Keïta, une dizaine de kilomètres plus au sud, où se situe une base de l’armée de l’air malienne.
Ces attaques ont été revendiquées par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, lié à Al-Qaida). Dans un communiqué, diffusé peu après 11 heures, l’organisation djihadiste affirme avoir mené une « opération spécifique » contre « l’aéroport militaire et une base d’entraînement de la gendarmerie » qui a entraîné d’« énormes pertes humaines et matérielles », ainsi que la « destruction de plusieurs avions de combat ».
De son côté, l’état-major a déclaré qu’« un groupe de terroristes a tenté de s’infiltrer dans l’école de gendarmerie de Faladié », ajoutant que des ratissages avaient été menés et que la situation était « sous contrôle ». En milieu de matinée, le général Oumar Diarra, le chef d’état-major général des armées, s’est rendu sur place et a affirmé que « les terroristes qui s’étaient infiltrés [avaient] été neutralisés ». Des personnes suspectées d’être complices ont aussi été arrêtées.
Si les autorités n’ont fourni aucun bilan humain, un officier a assuré au Monde que l’attaque contre l’école de gendarmerie avait fait « beaucoup de morts ». Selon une autre source malienne, de nombreux blessés ont été envoyés à l’Hôpital du Mali, un des principaux établissements hospitaliers de la capitale. L’école de gendarmerie abrite entre autres le siège des unités d’élite de la gendarmerie, le groupe d’action rapide de surveillance et d’intervention et le peloton d’intervention de la gendarmerie nationale.
En milieu d’après-midi, des tirs, en particulier d’obus, résonnaient toujours à l’aéroport de Bamako, au-dessus duquel s’élevait une épaisse fumée noire. Les assaillants y ont attaqué la base aérienne 101, qui accueille des avions et hélicoptères de l’armée de l’air malienne, ainsi qu’un détachement des mercenaires russes du Groupe Wagner. Des aéronefs militaires auraient été endommagés dans les combats. Jouxtant l’aéroport civil, la base 101 est située du côté sud du tarmac, à moins de un kilomètre des terminaux commerciaux. Sur des vidéos reçues par Le Monde, on distingue des impacts de balle sur des vitres d’un hall d’embarquement et de la zone duty-free.
La dernière attaque djihadiste d’ampleur au cœur de la capitale malienne remonte au 21 mars 2016 et à l’attentat contre l’Hôtel Nord-Sud, quartier général bamakois de la mission de formation de l’armée malienne par l’Union européenne, qui s’était soldé par la mort d’un assaillant. Le 22 juillet 2022, une attaque à la voiture piégée, revendiquée par le GSIM, avait visé le camp militaire de Kati, à une quinzaine de kilomètres au nord de Bamako, ville garnison et fief de la junte dirigée par le colonel Assimi Goïta. Un premier affront pour les militaires au pouvoir, qui ont fait de la reconquête de la souveraineté nationale l’alpha et l’oméga de leur politique.
Avec cette double attaque du GSIM en plein Bamako, la junte essuie un nouveau revers après sa défaite, fin juillet, à Tin Zaouatine, dans l’extrême-nord du pays, où les rebelles indépendantistes du Cadre stratégique permanent ont affirmé avoir tué 47 soldats maliens et 84 mercenaires de Wagner. Le groupe djihadiste, qui avait prévenu qu’il ciblait Bamako, avait visiblement soigneusement préparé cette opération complexe, qui a mobilisé plusieurs combattants et des moyens importants.
La date de l’attaque pourrait ne pas avoir été choisie au hasard. Elle intervient cinq jours avant la Fête de l’indépendance, le 22 septembre, et deux jours après le premier anniversaire de la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), qui regroupe, outre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, deux autres pays dirigés par des juntes militaires. « Grâce à cette alliance stratégique, nos forces de défense et de sécurité ont enregistré d’importantes victoires sur le terrain, affaiblissant considérablement les groupes armés terroristes », s’était félicité le colonel Goïta, président en exercice de l’AES, dans un discours à la télévision nationale, le 15 septembre. « Ces attaques à Bamako montrent l’échec de la junte, répond un opposant qui a requis l’anonymat. La situation sécuritaire n’est pas sous contrôle comme ils le prétendent. Il y a de grosses failles. Bamako n’est plus à l’abri, comme les autres grandes villes du pays. »
Benjamin Roger
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